par
- La route est partout
- Il faut toujours garder en tête une formule magique
- Quand j'étais petite
- Toute Résurrection commence par les pieds
- Acrobaties dessinées
- Qu'un bref regard sous le calme des cieux
- DQ/HK
- Elles en chambre
- Sanza lettere
- Mémoires des failles
- Laissez-passer
- Décor Daguerre
- Colloque des télépathes
- Paysage zéro
- Nous ne sommes pas des héros
- Le pas-comme-si des choses
- La revanche des personnes secondaires
- Des espèces de dissolution
- Monde de seconde main
- Cinéma de l'affect
- J'ai conjugué ce verbe pour marcher sur ton cœur
- Centre épique
- La geste permanente de Gentil-Cœur
- Payvagues
- Discographie
- 365+1
Portraits de nous
Lors d’une résidence d’écriture dans la Sarthe, Rémi Checchetto écrit des portraits de personnes qu’il rencontre. "Aucun roi parmi eux, nul grand de ce siècle, mais tous les autres. Ceux que l’on n’entend que très peu. Qui sont parfois évoqués par les journalistes, forment des statistiques et autres pourcentages. Les prétendus muets de naissance, les invisibles d’existence…" Soixante-dix-neuf parcours de vie, captés et transcrits en instantanés mobiles par un songeur sensible, un ensemble à facettes ponctué de réflexions sur l’écriture en situation.
Artistes de couverture :
Thématiques :
Cédric
ce que c’est que les gardons
Qu’on ne se trompe pas, au nombre beau grand nombre des choses et autres qui font le monde et défont le monde, sont les choses et autres visibles et les choses et autres pas visibles. Dans le visible du jour d’aujourd’hui de Cédric sont les mathématiques – la table de huit – l’histoire – Jules César qui a une statue en marbre au jardin des Tuileries – la géo – le département de la Sarthe avec ses trois autoroutes l’A11, l’A28 et l’A8. Dans l’invisible du jour d’aujourd’hui, il y a depuis une bonne demi-heure les poissons de la mare. Des gardons. Pas n’importe lesquels ; des gardons qui se gardent de mordre à l’hameçon. C’est que s’ils ignorent que l’abus de tabac est dangereux pour la santé, ils ne sont pas sans savoir que l’hameçon est très dangereux pour la vie, qu’il peut faire passer de vie à trépas sans passage ni par la réanimation ni par l’extrême-onction. Et ça, ça lui fait du bien à Cédric de ne rien pêcher. Être bredouille, c’est justement ne pas remonter à la surface ce qui ne se voit pas et ne s’entend pas. Ça lui fait le vide dans la tête. Et il aime ça, le vide dans la tête. C’est qu’il n’est pas sans ignorer que tout un tas de choses et autres guettent et sont prêtes à surgir. C’est que la tête est comme une mare. Ou comme un désert. Ou comme une salle de classe. Et qu’une espèce de monstre peut surgir. Ou une armée de légionnaires romains. Ou une cohorte de sept fois huit. Et puis de ne pas ramener de gardons pour le repas du soir, ça aussi c’est super bien, comme ça il y aura plutôt du steak haché bien cuit avec juste le sang du ketchup.
REGROUPER
Rémi Checchetto écrit, depuis dix ans, des portraits. Un peu partout où on l’appelle « en résidence », il rencontre des personnes, parle avec eux, se retire pour écrire puis, vingt minutes plus tard, les revoit et leur offre le texte qu’il a écrit. Proposition modeste en apparence, mais dont les effets, lorsqu’ils sont réunis en volume, ne sont pas minces. Ce ne sont pas des « vies minuscules », encore que la référence à Pierre Michon soit très présente, pas des vies exemplaires, pas des vies accomplies, même pas des « tranches » de vie, mais l’effet d’un frôlement de l’écriture par une personne. Ce bougé que la vie a laissé sur la surface immobile de la page, c’est ce qui passe dans ces 80 instantanés d’écriture. Rémi Checchetto atteint ainsi un des buts de la poésie, et ceci quelle que soit la forme d’écriture choisie. Le lecteur n’échappera pas à l’émotion que communique cette galerie de portraits, traces légères du passage des héros, en ceci qu’ils auront échappé, en un instant et pour toujours, à l’effacement. Il y faut beaucoup d’art.