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Dizains amoureux
Une femme qui porte une jupe en tissu africain regarde les fleurs des pavots se déplier d’un seul coup, sous ses yeux. Australie. Deuxième opus. Où la beauté vénéneuse de ce pays suscite la nostalgie de l’amour. Des scènes de rêve se mêlent à celles d’une réalité incertaine, en dizains comme dans l’opus précédent Ode à un kangourou.
l’hiver bleu et vert / à Sydney / mon été / 2011 fut Bolaño / en 2012 c’est Sebald / sourde mélancolie / nous chassons les corbeaux / de mon jardin aromatique / les petits perroquets se posent sur les fils à haute tension / lorikeets sitting on a power line
elle dit : les pensées entravent le corps / je pense : ficelé comme un rôti
nous les appelons The Kids / adorables Hallie et Ryan / se jettent dans le Pacifique / en plein hiver / The Kids remuent terre et mer / l’océan lance de longues vagues / blanches / on entend battre le cœur du monde / wind rain sun rainbow / l’amour de Hallie et Ryan
Fumi nous a préparé une salade / avec fleurs
sur la route de Melbourne / à l’intérieur des terres / Apology to a roadkill : / le parfum des eucalyptus embaume / le kangourou mort / hit by / écrasé par / un motard casque intégral / les arbres au tronc qui pèle / ont ici des feuilles en bouquets ronds
LIRE PLUSperroquets au sol en mode pigeon / gris à ventre rouge les gullahs
REGROUPEROde au coquelicot, dont les noms — corn poppy, Feldmohn, rosolaccio, papavero —, en Europe tout au moins, distillent cette douceur attenant au sommeil ? Non, ici c’est d’explosion qu’il s’agit, comme si Catherine Weinzaepflen transformait ces pétales en autant de micro feux d’artifice qui, comme ce nom l’indique, distillent couleur, chaleur, bruit et éclat. Il sera donc question de passion, de sédition et de révolution discrètement induites par la découverte d’un pays. Ce dernier introduit à d’autres noms propres, des vocables inouïs, des syntaxes étranges. À d’autres solitudes aussi, des chants singuliers, des cruautés bizarres, de mouvants refuges : « inaltérable houle/est ma maison ».